La fureur artistique a saisi Orsa à 20 ans, lorsque son père a soudainement passé à trépas, ne laissant aux deux hommes aucune chance de s’expliquer une dernière fois. « À son décès, j’ai tout plaqué. J’ai brûlé son argent au casino. Finalement, c’est l’art qui m’a sauvé », raconte ce papa 52 ans plus tard. Ses mains musclées, relevées de bagues, attirent l’œil d’emblée. Belles et puissantes à la fois, elles trahissent l’excellent équilibre yin-yang de leur viril mais si sensible propriétaire.
Grâce à cet « outil de travail », il s’exprime à même le sol donnant vie à de gigantesques toiles modernes mais intemporelles. Le plus souvent très colorées, elles arborent des faux airs d’art brut et de pop art.
A leur contemplation, elles se révèlent toutefois bien plus complexes et profondes. Lier les créations d’Orsa, qui ne veut pas être mis dans des cases, à de simples mots définissant des courants artistiques serait une paresse éloquente. « le mouvement, la couleur et l’invention » sont les boussoles d’Orsa. Sans le savoir, de ses créations peuvent ressurgir de fins airs de Kupka, Delaunay ou Wifredo lam figurent. Initiés ou non, à la découverte de ses œuvres, les contemplateurs ressentiront ces fameux ”WOW” instinctifs. Les coeurs expriment des “J’ADORSA!“ précise malicieusement l’artiste qui aime jouer avec les mots.
Orsa aime les « WOW ! ». Ceux surgis du cœur qui alimentent son élan créatif comme ceux qu’il entend souvent de la bouche de son public. De son vrai nom Jean-Dominique Orsatelli, l’artiste contemporain corse a déposé ses valises pour quelque temps dans un atelier éphémère en Valais. Non seulement terre d’accueil de son fils, Orsa s’y est laissé porter par de belles rencontres. Il cite de profonds liens d'amitié liés avec le tant regretté Bruno Bagnoud, son ami Patrick Fellay, la Famille Vogel, et bien entendu François Chabanian. Ce dernier a fait honneur aux œuvres d’Orsa dans la Galerie “Bel-Air Fine Art” de Verbier, exposé aux côtés d’autres grands artistes confirmés. Le Valais n’est certainement pas un hasard, chose à laquelle il affirme ne pas croire. Sa récente découverte de parenté avec le Baron Eugène François Orsatelli pourrait bien faire l’objet d’une synchronicité étonnante: anobli de manière personnelle par Napoléon Bonaparte, l’aïeul de notre artiste aurait déjà foulé nos terres valaisannes dans les années 1800 aux côtés de l’Empereur Corse. Ce serait alors une explication de plus pour son attachement aux terres valaisannes.
C’est donc dans une zone industrielle de Saxon, forcément un peu grisâtre, qu’Orsa a trouvé refuge pour ses toiles colorées et ses sculptures en bronze d’inspirations Massaï. Un de ses bronzes monumentaux représentant un couple de Massaï de plus de 3 mètres de haut est notamment à admirer dans le somptueux écrin de l’hôtel W à Verbier, où Pierre-Henri Bovsovers a accueilli l’installation les bras ouverts.
Les coeurs expriment des “J’ADORSA!“ précise malicieusement l’artiste qui aime jouer avec les mots. Celui dont la couleur préférée pourrait paradoxalement bien être bien le blanc est un humaniste, un anticonformiste et un baroudeur très sensible. La vie lui a beaucoup donné mais ne l’a pas ménagé non plus. Les deux revers de cette même pièce sont indissociables. En vieux sage, Jean-Dominique Orsatelli le sait et l’a accepté.
En 1959, sa famille est contrainte de quitter précipitamment Castiglione, petite station balnéaire d’Algérie française où il est né 9 ans plus tôt. Le garçonnet laisse derrière lui le bleu rassurant de sa Méditerranée, mais surtout sa nounou Aïcha adorée qui lui avait mis le pied à l’étrier en lui offrant des craies. Gamin, Orsa est un passionné de football et excelle comme gardien de but. Jeune adulte et très beau gosse, en plein yéyé, son charisme est remarqué. Il enregistre quelques disques, fait une première partie de Joe Dassin sur une tournée en france et dans l’émission “Champs Elysées” de Michel Drucker avec Nougaro et ensuite Dmis Roussos. Il a eu le grand honneur d’y rencontrer des professionnels formidables et retient un fort souvenir de son amitié avec Etienne Roda Gil. Toutefois, le monde du show-bizz “plein de faux semblant” n’est pas pour le bellâtre, sensible et profondément libre. Après la naissance de son fils Lucas en 1987, la boussole interne d’Orsa le dirige vers Abidjan en Côte d’Ivoire, où il s’expatrie en 1991. Il y trouve la maturité et sa fureur créatrice s’y déchaîne. Pour lui c’est certain, il a trouvé son pied à terre.
En 1999, sa tour d’ivoire s’effondre sur un coup d'État qui l’a profondément traumatisé. L’artiste est sommé de quitter les latitudes équatoriales-tropicales et retourne douloureusement en Corse, plus précisément à Calvi. Accueilli et soutenu par la Famille Cardi, il retrouve sa rage de créer et sublime de manière encore plus frénétique ses escarres grâce à l’art. En 2017, son travail prolifique lui vaudra de faire l’objet d’une publication entièrement consacrée à lui dans “BeauxArts”, magazine de référence. Si son art pourrait être brut, Orsa, lui, respire la joie de vivre, l’envie de partager, le plaisir de rencontrer.
Les Valaisans ont tendance à l’aimer pour cette authenticité et cette simplicité qui fait écho à la leur. Ses œuvres, finalement assez spirituelles, séduisent assurément le mystique sommeillant en chaque montagnard. Orsa se perçoit émissaire d’une énergie créatrice parfois dépassant sa raison. On le discerne clairement dans quelques-unes de ses rares œuvres d’inspiration chrétienne, tel cet esthétique et lumineux crucifix fait de clous du 17è siècle soudés. Posé derrière lui sur un établi, il nous fait de l’œil au moment de le quitter sur un dernier WOW! J’adore ça!